Le 6ème jour de l’œuvre de Dieu
Les animaux terrestres et le couple humain

Le 6ème jour, coupole de la Genèse. Basilique de Saint-Marc, Venise (XIII siècle). Les animaux terrestres représentés par couples et l’être humain à l’aspect sombre car il est terrestre, fait de la poussière de la terre, mais appelé à être enfant de Dieu, enfant de lumière. Il achèvera l’oeuvre de Dieu uni à Dieu, uni dans le lien d’amour du couple, sera conduit dès ténèbres à la lumière de l’amour pour son prochain.
Au sixième jour s’achève l’œuvre de Dieu. C’est l’œuvre du Dieu trinitaire, celui qui est relation d’amour, qui crée par sa Parole et donne vie par son propre Esprit, par son propre souffle. C’est à dire que vivre de la vie de Dieu, c’est aimer et aimer comme lui il nous aime. Pour nous conduire à cette perfection d’amour, sa Parole se fait chair. En effet, c’est sa Parole qui exprime parfaitement son désir de partager sa joie, c’est pour cela que sa Parole est créatrice : pour répandre son amour sur d’autres, afin que la joie de voir le bonheur des créatures puisse compléter et porter à la perfection l’amour en se multipliant. La joie partagée est une joie multipliée. Tout dans l’œuvre de Dieu nous parle de multiplications. Cette joie qui se répand parmi les créatures est celle de l’amour porté à sa perfection car Jésus nous dit: « Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime. » (Jean 15, 13). Telle est la volonté de Dieu, son désir le plus grand: que nous soyons heureux, tout comme les parents désirent le plus grand bonheur pour leurs enfants. Alors, si l’être humain n’avait pas de doutes sur cela, il se laisserait conduire par la volonté de Dieu, comme un petit enfant fait confiance à ses parents aimants. Il s’agit donc d’accorder deux volontés, de faire confiance. C’est cela le but de l’œuvre de Dieu et le sixième jour va nous dire exactement cela: pourquoi tout cela, toute cette œuvre, est très bonne. En effet, après les cinq premières étapes à travers lesquelles Dieu conduit la création à sa perfection en concluant à chaque fois que cela était bon, en achevant son œuvre il dira que cela est très bon. En effet, en cette étape se révèle l’objectif atteint, tout est très bon parce tout a été conduit à la perfection de l’amour. Finalement l’être humain est capable de dominer et conduire les animaux terrestres qui rampent sur la terre, vers les réalités célestes. Encore une fois ces animaux sont l’image de nos vices et vertus, mais maintenant le texte nous dit que l’être humain sera capable de les conduire à leur perfection. Voyons donc en quoi consiste cette perfection. C’est que dans l’être humain se trouve l’image et la ressemblance de Dieu. Dieu qui est amour devient visible à travers l’amour du couple: homme et femme, il les créa, à son image et ressemblance. C’est ici le mot ressemblance qui nous dit la perfection, l’achèvement de l’œuvre car tout ce qui est créé à l’image possède la capacité d’être pleinement ressemblant, mais être à l’image n’implique pas encore la pleine ressemblance. En effet, l’image de quelqu’un, son portait, peut aussi ne pas être fidèle à son modèle. Le fait d’être à l’image ne dit pas encore la parfaite ressemblance. Ainsi, il faudra plusieurs étapes pour conduire ce qui est à l’image jusqu’à à la pleine ressemblance. Toute l’histoire de l’humanité nous raconte cette œuvre de Dieu qui consiste à nous conduire jusqu’à la pleine ressemblance avec lui, jusqu’au plus grand amour. Et cette œuvre il l’accomplit à travers son Fils, sa Parole. « Moi et mon Père nous sommes toujours à l’œuvre » nous dit Jésus. C’est à travers le témoignage d’amour que toutes les créatures seront conduites à la perfection. (Pour un approfondissement voir le 6ème jour dans l’article Genèse 1,1 – 2, 3 Les sept jours, étapes de l’amour)
Les étapes de la vie de Jésus et la Semaine Sainte
Le Vendredi Saint

La croix arbre de vie, église de Saint-Clément, Rome (XII siècle). Le Christ, vivant et apaisé sur la croix, offre la vie de Dieu, l’amour de Dieu au monde. Comme la vraie vigne qui donne vie aux sarment. La main du Père en haut de la croix, c’est lui le vigneron qui peut tout conduire au bien, qui s’occupe de faire porter du fruit aux hommes et femmes qui l’aiment. Ainsi, la relation filiale confiante avec Dieu est restaurée, le paradis est à nouveau ouvert à l’humanité, qui vit maintenant dans la proximité avec Dieu, apaisée, pardonnée. Le fleuve de vie de l’amour de Dieu, va dans les quatre directions irriguer la terre, comme décrit dans le livre de la Genèse.
Le sixième jour des étapes de l’oeuvre de Dieu, nous dit comment cette oeuvre est conduite à la perfection par le couple humain qui révèle au monde l’image de Dieu. Cette image consiste dans la relation d’amour que l’être humain est aussi capable de vivre, avec la même intensité que Dieu, dans la pleine ressemblance. Or, le couple qui porte du fruit, la famille humaine, est un reflet évident de l’amour de Dieu. Cependant le texte de la Genèse, qui appartient à l’ancienne alliance, est une annonce de la nouvelle. Il s’agit d’un texte prophétique et Jésus a longuement expliqué aux apôtres comment tout ce qui est proclamé dans les anciens textes des prophètes annonce l’oeuvre que lui, le Messie, le Fils de Dieu, va accomplir. Il s’agit de textes prophétiques dont la plénitude du sens sera révélée par sa mort et sa résurrection. C’est donc précisément au sixième jour de la Semaine Sainte, lorsque Jésus va offrir sa vie sur la croix que cette image du couple va être conduite à sa pleine ressemblance, c’est-à-partir de ce sixième jour de la Semaine Sainte que ce couple pourra porter du fruit, se multiplier et refléter donc encore davantage l’amour de Dieu dans toute sa grandeur. En effet, lorsqu’il est question de l’être humain Adam dans la Bible, il ne s’agit pas seulement de notre ancêtre dans l’histoire, mais surtout du Christ lui-même qui conduit l’oeuvre de la création à son accomplissement.
Voyons comment l’apôtre saint Paul nous explique cela:
« L’Écriture dit : Le premier homme, Adam, devint un être vivant ; le dernier Adam – le Christ – est devenu l’être spirituel qui donne la vie. Ce qui vient d’abord, ce n’est pas le spirituel, mais le physique ; ensuite seulement vient le spirituel. Pétri d’argile, le premier homme vient de la terre ; le deuxième homme, lui, vient du ciel. Comme Adam est fait de terre, ainsi les hommes sont terrestres; comme le Christ est du ciel, ainsi les hommes seront du ciel. Et de même que nous aurons été à l’image de celui qui est fait de terre, de même nous serons à l’image de celui qui vient du ciel. » (1 Corinthiens 15, 45-49).
Et aussi, saint Paul nous parle de Jésus comme de celui qui est le premier-né de toute créature, nous rappelant aussi les paroles de Jean le Baptiste qui disait que bien que né après lui, il était déjà avant lui :
« Vous serez fortifiés en tout par la puissance de sa gloire, qui vous donnera toute persévérance et patience. Dans la joie, vous rendrez grâce à Dieu le Père, qui vous a rendus capables d’avoir part à l’héritage des saints, dans la lumière. Nous arrachant au pouvoir des ténèbres, il nous a placés dans le Royaume de son Fils bien-aimé : en lui nous avons la rédemption, le pardon des péchés. Il est l’image du Dieu invisible, le premier-né, avant toute créature : en lui, tout fut créé, dans le ciel et sur la terre. Les êtres visibles et invisibles, Puissances, Principautés, Souverainetés, Dominations, tout est créé par lui et pour lui. Il est avant toute chose, et tout subsiste en lui. Il est aussi la tête du corps, la tête de l’Église : c’est lui le commencement, le premier-né d’entre les morts, afin qu’il ait en tout la primauté. Car Dieu a jugé bon qu’habite en lui toute plénitude et que tout, par le Christ, lui soit enfin réconcilié, faisant la paix par le sang de sa Croix, la paix pour tous les êtres sur la terre et dans le ciel. » (Colossiens 1, 11-20).
Ainsi, lorsque Jésus est sur la croix, c’est alors que Dieu donne sa vie à l’humanité, il nous manifeste l’oeuvre de Dieu au sixième jour, l’étape conclusive où l’être humain est conduit à la pleine ressemblance avec Dieu parce qu’il pourra alors accueillir son amour, entrer dans une relation confiante et filiale avec lui et porter du fruit, c’est-à-dire refléter son amour et sa miséricorde en ce monde.
Voyons donc les paroles que Jésus adresse à l’humanité lorsqu’il est sur la croix, au moment d’offrir sa vie, de remettre son souffle dans les mains du Père afin que celui-ci le répande sur l’humanité. Ces dernières paroles nous rappellent aussi celle qu’Adam prononce au deuxième chapitre de la Genèse, lorsqu’il s’adresse à la femme, Ève, dont le nom signifie « celle qui fait vivre ». Adam appela sa femme Ève (en hébreu ḥavvah signifie celle qui fait vivre) car elle était la mère de tout vivant » (Genèse 3, 20). Ainsi, Jésus, dernier Adam qui conduit l’humanité à la plénitude de l’amour et insuffle en elle son esprit de vie, lorsqu’il est sur la croix, s’adresse à sa mère, Marie, en l’appelant « femme »:
« Jésus, voyant sa mère, et près d’elle le disciple qu’il aimait, dit à sa mère : « Femme, voici ton fils. » Puis il dit au disciple : « Voici ta mère. » (Jean 19, 26-27).
Jésus appelle sa mère femme parce que par elle il s’adresse à toute l’humanité. Marie, en effet, est l’image de l’humanité qui est parfaitement unie à Dieu, parfaitement confiante. Elle n’a pas douté de la parole de Dieu qui lui a annoncé qu’elle allait être la mère du Sauveur, même si elle ne connaissait pas d’homme. Elle avait répondu: « Je suis la servante du Seigneur, qu’il me soit fait selon ta parole. » Elle avait ainsi permis à toute l’humanité d’accueillir le Sauveur, elle a accueilli l’Esprit de Dieu qui a pu ainsi donner la vie divine à l’humanité, c’est ainsi que la Parole de Dieu s’est faite chair, lorsqu’elle elle a pu faire confiance, avoir foi dans le plan et la parole de Dieu.Mais, Dieu agit envers l’humanité comme un fiancé envers sa fiancée: il ne peut pas la forcer, il la respecte et attend son « oui ». Ce « oui » est finalement arrivé après des siècles grâce à Marie qui a fait confiance à Dieu, qui a été prête à faire la volonté de Dieu parce qu’elle n’a pas douté de sa bienveillance. A ce moment-là la volonté divine s’est unie à la volonté humaine, les deux n’ont fait plus qu’un. Et c’est cela qui s’accomplit en Jésus, lorsqu’il offre sa vie sur la croix. Au Jardin des Oliviers, la nuit précédente, il avait dit: « Père si tu le veux éloigne de moi cette coupe, cependant non pas ma volonté mais que ta volonté soit faite. »(Luc 22, 42). Cette volonté de Dieu s’accomplit finalement sur la croix, c’est là qu’il nous donne sa vie, qu’il nous fait connaître l’amour infini qu’il porte à ses créatures, afin que ses créatures reçoivent la vie, puissent rentrer dans la relation divine trinitaire dans la pleine confiance des enfants de Dieu, la confiance dont Jésus a été le témoin. Ainsi, Dieu, accomplissant son oeuvre sur la croix, s’adresse à Marie qui a accueilli son amour, ouvrant l’accès à toute l’humanité pour l’accueillir à son tour, et lui transmet sa vie. Il l’appelle femme et lui confie Jean qui, recevant aussi le don d’amour de la vie divine, se trouve à naître dans une famille nouvelle, à laquelle nous sommes engendrés par la foi. Jean n’est pas le fils de Marie selon la chair et le sang, mais le devient par la foi. Par la foi en l’amour de Dieu nous naissons tous à une vie nouvelle, où nous sommes tous frères et soeurs, où nous formons une nouvelle famille. « Jésus répondit : « Qui est ma mère, et qui sont mes frères ? » Puis, étendant la main vers ses disciples, il dit : « Voici ma mère et mes frères. Car celui qui fait la volonté de mon Père qui est aux cieux, celui-là est pour moi un frère, une sœur, une mère. » (Matthieu 12, 48-50). Ainsi, Jésus préparait les disciples à former cette famille nouvelle qui ne connaît pas de frontières de langue ou de peuple, en disant: « Amen, amen, je te le dis : personne, à moins de naître de l’eau et de l’Esprit, ne peut entrer dans le royaume de Dieu. Ce qui est né de la chair est chair ; ce qui est né de l’Esprit est esprit. Ne sois pas étonné si je t’ai dit : il vous faut naître d’en haut. » (Jean 3, 5-7). Et de même l’apôtre Jean rapporte: « À tous ceux qui l’ont reçu, il a donné de pouvoir devenir enfants de Dieu, eux qui croient en son nom. Ils ne sont pas nés du sang, ni d’une volonté charnelle, ni d’une volonté d’homme : ils sont nés de Dieu. » (Jean 1, 12-13). C’est par l’esprit que s’effectue cette naissance nouvelle, par la foi, la confiance qu’on peut mettre en Dieu. C’est cet esprit qui allait être figuré par l’eau et le sang qui ont coulé de son côté, signe du fleuve de vie de l’amour de Dieu qui se répand dans les quatre directions pour irriguer le monde. Ainsi, tout comme il est dit, d’une façon prophétique que Ève naît du côté d’Adam, c’est du côté transpercé, ouvert du dernier Adam, Jésus-Christ, que la nouvelle humanité trouve naissance. Ceux qui étaient à ses pieds, Marie et Jean, qui forment maintenant une nouvelle famille attestent: « Un des soldats avec sa lance lui perça le côté ; et aussitôt, il en sortit du sang et de l’eau. Celui qui a vu rend témoignage, et son témoignage est véridique. » (Jean 19, 34). L‘évangéliste saint Jean qui était donc lui-même aux pieds de la croix, continuant son témoignage, nous rapporte encore les derniers mots de Jésus:
« Après cela, sachant que tout, désormais, était achevé pour que l’Écriture s’accomplisse jusqu’au bout, Jésus dit : « J’ai soif. » Il y avait là un récipient plein d’une boisson vinaigrée. On fixa donc une éponge remplie de ce vinaigre à une branche d’hysope, et on l’approcha de sa bouche. Quand il eut pris le vinaigre, Jésus dit : « Tout est accompli. » Puis, inclinant la tête, il remit l’esprit. » (Jean 19, 28-30).
Ainsi, Jésus, ayant offert et insufflé sa vie à l’humanité, pourra accomplira les paroles d’Adam qui voyait dans la femme la mère de tous les vivants. Les vivants sont ceux qui vivent de la vie et de l’amour de Dieu, ils deviennent une nouvelles famille et Marie sera l’image de l’Eglise, corps du Christ, qui continue de transmettre sa vie au monde, engendrant ainsi de nouveaux êtres à la vie divine, tout comme Jean a pu naître à cette nouvelle famille en contemplant et accueillant l’amour que Dieu lui a montré en Jésus sur la croix.
Saint Paul aussi nous parlera de cette multiplication, de la transmission de la vie divine au monde, par la foi rendue possible par le même témoignage d’amour que les apôtres et les fidèles porteront au monde, en offrant leur vie à l’image et ressemblance du Christ:
« Mes enfants, vous que j’enfante à nouveau dans la douleur jusqu’à ce que le Christ soit formé en vous » (Galates 4, 19).
Aussi, dans le verset suivant saint Paul nous parle de cet enfantement qui se fait dans la douleur des épreuves de la persécution, tout comme cela s’est passé pour le Christ. En effet, devenu membre du corps du Christ, il portera comme lui ce témoignage d’amour au monde, jusqu’au don de sa propre vie:
« Maintenant je trouve la joie dans les souffrances que je supporte pour vous ; ce qui reste à souffrir des épreuves du Christ dans ma propre chair, je l’accomplis pour son corps qui est l’Église. De cette Église, je suis devenu ministre, et la mission que Dieu m’a confiée, c’est de mener à bien pour vous l’annonce de sa parole » (Colossiens 1, 24-25).
C’est pour signifier cela que Jésus sur la croix accepte de boire le vinaigre amer, il accepte la souffrance de cet enfantement, afin que l’humanité puisse trouver une naissance nouvelle, une nouvelle vie.
Encore saint Paul nous explique cela:
« Puisque nous sommes ses enfants, nous sommes aussi ses héritiers : héritiers de Dieu, héritiers avec le Christ, si du moins nous souffrons avec lui pour être avec lui dans la gloire. J’estime, en effet, qu’il n’y a pas de commune mesure entre les souffrances du temps présent et la gloire qui va être révélée pour nous. En effet, la création attend avec impatience la révélation des fils de Dieu. Car la création a été soumise au pouvoir du néant, non pas de son plein gré, mais à cause de celui qui l’a livrée à ce pouvoir. Pourtant, elle a gardé l’espérance d’être, elle aussi, libérée de l’esclavage de la dégradation, pour connaître la liberté de la gloire donnée aux enfants de Dieu. Nous le savons bien, la création tout entière gémit, elle passe par les douleurs d’un enfantement qui dure encore. » (Romains 8, 17-22)
Or, ce témoignage du don de sa propre vie, ne se termine pas nécessairement pour les êtres humains par le fait de verser son propre sang. C’est aussi à l’image du Christ que nous offrons notre vie dans le quotidien dans le service de notre prochain, dans l’amour de la famille. Voyons, dans la prochaine section, comment cela peut embrasser tous les aspects de notre vie quotidienne et porter du fruit.
La relation avec Dieu et avec notre prochain
Le mariage: l’arbre de vie et les noces de Cana
Le mariage entre un homme et une femme est à l’image de l’union entre Dieu et l’humanité. D’après les paroles de saint Paul:
« Comme dit l’Écriture : À cause de cela, l’homme quittera son père et sa mère, il s’attachera à sa femme, et les deux seront une seule chair. Ce mystère est grand : je le dis en référence au Christ et à l’Église. » (Ephésien 5, 31-32).
Jésus pour nous parler de ce mystère, pour le rendre visible à nos yeux, va nous donner deux images: la vigne et l’eau transformée en vin. La vigne nous rend visible la relation, la vie qui est transmise du cep aux branches, si les branches sont unies au tronc, sa lymphe, son amour va leur faire porter du fruit avec l’aide du vigneron. L’eau, une fois qu’elle accueille l’Esprit, l’alcool et la saveur du vin, trouve toute sa saveur. Voyons ces deux images qui nous parlent de l’union entre Dieu et l’humanité, union qui a lieu à chaque instant dans notre vie, tout comme l’échange et la communion dans l’esprit et dans le corps qui a lieu au sein d’un couple marié, d’une famille.
L’arbre de vie, la vigne

Détail de la croix arbre de vie, église de Saint-Clément, Rome (XII siècle). Les scènes de la vie quotidienne entourées de la présence d’amour de Dieu, En toute activité se vit l’amour de Dieu et du prochain, à tout instant nous pouvons accueillir et vivre de l’esprit d’amour de Dieu. « Celui qui demeure en moi et en qui je demeure, celui-là porte beaucoup de fruit » (Jean 15, 5).
Dans l’image ci-dessus, nous voyons que les volutes de l’arbre de vie s’étendent aux scènes de la vie quotidienne: tout peut être fait par amour, c’est la vie de Dieu qui transforme l’être humain en chaque instant de sa vie. Nous y observons une femme qui donne à manger aux poules, des bergers, des moines qui écrivent et tant d’autres activités qui loin d’empêcher notre présence à Dieu, au contraire l’expriment car c’est lui qui est « le chemin, la vérité, la vie » (Jean 14, 6), c’est lui qui est présent à nous à chaque instant.
Accueillir la vie de Dieu, signifie entrer en confiance avec Lui, ne pas douter que sa volonté puisse vouloir autre chose que notre propre bien. Toute son oeuvre c’est que nous portions du fruit et du fruit en abondance. Or, porter du fruit en ce monde, c’est porter un témoignage d’espérance et d’amour, c’est être un reflet de la lumière de Dieu, de sa miséricorde pour ceux qui ont besoin de recevoir son amour. Voyons, comment Jésus lui-même nous parle de cela:
« Moi, je suis la vraie vigne, et mon Père est le vigneron. Tout sarment qui est en moi, mais qui ne porte pas de fruit, mon Père l’enlève ; tout sarment qui porte du fruit, il le purifie en le taillant, pour qu’il en porte davantage. Mais vous, déjà vous voici purifiés grâce à la parole que je vous ai dite. Demeurez en moi, comme moi en vous. De même que le sarment ne peut pas porter de fruit par lui-même s’il ne demeure pas sur la vigne, de même vous non plus, si vous ne demeurez pas en moi. Moi, je suis la vigne, et vous, les sarments. Celui qui demeure en moi et en qui je demeure, celui-là porte beaucoup de fruit, car, en dehors de moi, vous ne pouvez rien faire. Si quelqu’un ne demeure pas en moi, il est, comme le sarment, jeté dehors, et il se dessèche. Les sarments secs, on les ramasse, on les jette au feu, et ils brûlent. Si vous demeurez en moi, et que mes paroles demeurent en vous, demandez tout ce que vous voulez, et cela se réalisera pour vous. Ce qui fait la gloire de mon Père, c’est que vous portiez beaucoup de fruit et que vous soyez pour moi des disciples. Comme le Père m’a aimé, moi aussi je vous ai aimés. Demeurez dans mon amour. Si vous gardez mes commandements, vous demeurerez dans mon amour, comme moi, j’ai gardé les commandements de mon Père, et je demeure dans son amour. Je vous ai dit cela pour que ma joie soit en vous, et que votre joie soit parfaite. » (Jean 15, 1-11).
Ainsi, la croix devient arbre de vie, comme nous le voyons dans la mosaïque de l’église St-Clément à Rome, ci-dessus. Pendant les premiers siècles, les chrétiens ne représentaient pas la croix avec le Christ mort dessus. Il figuraient l’arbre de vie, car le bois sec de la croix est devenu une source de vie, à laquelle tout être humain peut puiser, elle devient la source inépuisable de l’amour de Dieu. Aussi, dans les liturgies les moines chantaient la croix arbre de vie, voici un extrait d’une hymne dédiée à la croix par Venance Fortunat (Vè siècle) :
« Bel arbre resplendissant, éclatant de lumière,
Tu es paré de la pourpre royale ;
Tu fus élu comme l’arbre le plus digne
De porter ce corps très saint, de toucher à ses membres.
Heureuse croix où pèse la rançon du monde,
Par qui l’enfer a tremblé en son empire ;
Heureuse es-tu de porter ce fruit de vie,
Et les peuples rassemblés applaudissent ton triomphe.
Salut, Sainte Croix, salut, notre unique espérance !
Salut, autel qui portas l’Agneau sans tache.
De par la grâce de sa Passion très sainte
La vie a enduré la mort et la mort rendu la Vie. »
Et aussi, dans un autre poème de Venance Fortunat:
« Plantée près d’un cours d’eau, tu te montres dans toute ta splendeur,
et étales ton feuillage orné de fleurs récemment écloses.
Entre tes bras une vigne est suspendue
d’où coule un vin qui est la rougeur du sang. »
Dans la mosaïque, les volutes de l’arbre de vie qui représente la croix, vont entourer les scène de la vie quotidienne, car c’est là que chacun met sa volonté en accord avec la volonté de Dieu. En effet, Jésus nous dit: « Moi, je suis le chemin, la vérité, la vie » (Jean 14, 6) et cela signifie qu’à chaque instant la vie nous offre une opportunité d’aimer, de servir notre prochain, de faire la volonté de Dieu. Aussi, lorsque notre prochain ne nous accueille pas et qu’il demande patience, endurance, de notre part, celle-ci aussi est une preuve d’amour.
Or, le lieu où se vit d’une manière particulièrement intense cette expérience d’amour, d’accueil de la vie est le couple. Se mettre l’un au service de l’autre, à l’écoute de l’autre, implique une transformation de notre vie, nous sommes appelés à faire des choses que nous n’aurions jamais faites si nous ne nous étions pas liés à quelqu’un d’autre. Cela donne ainsi l’impression de se perdre soi-même, de ne s’écouter pas soi-même, de ne rien faire pour soi. Et pourtant, c’est bien cela qu’implique le fait de donner sa vie, de l’offrir. Jésus dit: « Si quelqu’un veut marcher à ma suite, qu’il renonce à lui-même, qu’il prenne sa croix et qu’il me suive. Car celui qui veut sauver sa vie la perdra, mais qui perd sa vie à cause de moi la trouvera. » (Matthieu 16, 24-25). En effet, dans le mariage, en nous mettant réciproquement les uns au service des autres, nous offrons à Dieu et donc à la vie, une opportunité de nous modeler, de nous transformer, de découvrir encore mille façons d’aimer que nous n’aurions pas découvertes tout seuls. C’est ainsi que Dieu nous rapproche de lui, à travers un amour qui est plus semblable au sien, de celui qui est capable d’aimer chacune de ses créatures et de se mettre au service de toutes. Notre amour est beaucoup plus restrictif, nous aimons facilement ceux et celles qui exigent de nous ce que nous aimons faire, mais aimons moins ce qui nous conduit à quitter notre propre image de l’amour, nos projets, nos plans d’amour, pour en découvrir d’autres.
Dans les paroles qu’il adresse à Moïse, Dieu recommande de ne pas se faire d’image taillée, de ne pas s’imaginer une ressemblance avec les réalités célestes (Exode 20, 4), car Dieu est amour. Les images que nous nous faisons constamment de l’amour, de ce que nous devrions faire pour aimer, de ce que nous imaginons être la meilleure façon d’aimer Dieu et son prochain, peuvent, en effet, être illusoires, ne pas répondre à ce que Dieu ou notre prochain attend de nous. Lorsque Jésus nous dit qu’il faut renoncer à soi-même, il nous appelle à renoncer à imaginer ce que je pourrais faire pour Dieu et mon prochain et être à l’écoute des demandes, des besoins concrets de l’autre. Le risque, en effet, est d’imaginer ce qu’on pourrait faire pour notre prochain à notre convenance, selon ce qui nous correspond, mais peut-être Dieu, la vie, nous propose de découvrir d’autres chemins que nous n’avons pas imaginés, qui peut-être ne nous conviennent pas, mais correspondent aux réels besoins de notre prochain. Or, notre vie est un chemin vers la découverte du plus grand amour, de l’amour de Dieu, de la joie la plus grande, mais cela dépasse notre imagination, cela nous conduit à découvrir autre chose que nous-même. Dans la Bible, Dieu nous dit souvent « mes pensées ne sont pas vos pensées, et vos chemins ne sont pas mes chemins. Autant le ciel est élevé au-dessus de la terre, autant mes chemins sont élevés au-dessus de vos chemins, et mes pensées, au-dessus de vos pensées. » (Isaïe 55, 8-9).
C’est vrai qu’en ce monde il y a beaucoup d’incompréhensions et Jésus n’a pas été compris, non plus, non seulement par les gens en général, mais aussi par ses parents et ses apôtres. Les évangiles nous racontent qu’à l’âge de 12 Jésus aurait voulu rester au Temple de Jérusalem pour expliquer la parole de Dieu, mais ses parents lui firent des reproches car ils l’avaient cherché et s’étaient inquiétés pour lui. « Jésus leur dit : « Comment se fait-il que vous m’ayez cherché ? Ne saviez-vous pas qu’il me faut être chez mon Père ? » Mais ils ne comprirent pas ce qu’il leur disait. Il descendit avec eux pour se rendre à Nazareth, et il leur était soumis.» (Luc 2, 49-51). De même, très souvent lorsqu’il parle aux apôtres des réalités spirituelles et célestes, ils ne comprennent pas. Ce n’est pas Dieu qui nous fait vivre ces épreuves, ces incompréhensions par malveillance, c’est que, malheureusement, l’humanité est dans les ténèbres et, pour apporter un peu de lumière dans ces ténèbres, on se confronte à cette incompréhension. En même temps cette douleur du désaccord, du conflit, peut aussi être un chemin pour connaître une joie plus grande. Là est la volonté du Père, la joie de voir le bonheur de notre prochain, la joie d’avoir engendré notre prochain à la vie nouvelle, de le voir dans la paix, cela sera aussi notre paix. Ainsi, l’expérience d’amour grandit en nous et notre joie, notre confiance aussi. Jésus nous rappelle: « Or, telle est la volonté de Celui qui m’a envoyé : que je ne perde aucun de ceux qu’il m’a donnés, mais que je les ressuscite au dernier jour. » (Jean 6, 39).
Dans le mariage, on approfondit de manière exemplaire, en quoi consiste la nature de la relation d’amour, comment est-il possible de ne faire qu’un? comment est-il possible que la joie de l’autre devienne aussi ma joie, ou la peine de l’autre ma propre peine? Il s’agit là de vivre une communion, un échange dans l’esprit, qui est aussi l’Esprit d’amour qui unit en un seul Dieu le Père, le Fils et le Saint Esprit. Il y a la différence des personnes et pourtant leurs volontés veulent la même chose. Ainsi, dans notre expérience terrestre, nous aurons toujours des incompréhensions et des divisions, souvent il faut les accepter et se retrouver dans la volonté d’aimer l’autre malgré tout, dans le désir du bonheur de l’autre qui sera source de vie pour nous-mêmes.
Ainsi, le Vendredi Saint s’accomplit un vrai mariage entre Dieu et l’humanité. Dieu prend tous les risques pour nous, si cela peut nous conduire au plus grand bonheur, si cela peut nous faire découvrir en quoi consiste l’amour, où se trouve notre joie, notre source de bonheur.
L’eau transformée en vin, les noces de Cana

Le miracle de Cana, baptistère de la basilique de Saint-Maurice, Suisse. Mosaïque de Madeline Diener. Jésus transforme les cinq jares d’eau en vin, c’est l’image de l’humanité transformée par l’Esprit de Dieu, par son amour, en un vin savoureux. La couleur rouge du vin rappelle aussi le sang, la vie que Jésus nous a offert sur la croix. Cette preuve d’amour permet à l’humanité de retrouver la confiance en la bienveillance divine et la coupe de l’alliance est devant le couple de fiancés en haut de l’image. Ils figurent l’alliance entre Dieu et l’humanité, entre le Christ et l’Eglise. C’est le repas des noces de l’agneau qui est ici annoncé par ce miracle, l’humanité réconciliée et unie à Dieu en un seul corps, un seul esprit.
Tout cela Jésus l’a annoncé par un geste très fameux, un miracle qu’il a accompli afin de nous parler, de nous donner une image qui nous aide à comprendre la nature de cette réalité spirituelle où nous sommes unis à Dieu et ne faisons plus qu’un avec lui, tout comme dans l’union de l’homme et de la femme, les deux ne font plus qu’un. En effet, lors de son premier miracle, à Cana, Jésus transforme de l’eau en vin. Voyons de quelle façon ce miracle nous donne une image de l’union entre Dieu et l’humanité. Jésus, sa mère et des disciples sont invités à un mariage à Cana. Lorsque Marie s’aperçoit qu’il n’y a plus de vin, elle demande à Jésus de venir en aide aux mariés. Or, il faut savoir que depuis l’âge de douze ans, Jésus est resté soumis à ses parents, depuis qu’il ne lui avaient pas permis de rester tout seul à Jérusalem pour expliquer la parole de Dieu au Temple. C’est que Dieu, dans son attitude de respect pour l’humanité, à laquelle il s’adresse comme à une fiancée, ne peut pas forcer celle-ci et lui imposer sa volonté. Il attend toujours le « oui », le consentement de l’humanité à le recevoir. Or, Marie, c’est le premier être humain à avoir pleinement accueilli la présence et la volonté de Dieu, à avoir accepté de participer à son plan de salut pour l’humanité. Elle a donc accepté d’être la mère de Jésus, elle a dit oui à la proposition de Dieu. Mais, ensuite, comme être humain, elle a essayé de comprendre au mieux comment assumer cette tâche. Sachant que l’enfant qu’elle a mis au monde, serait un jour victime des jalousies des hommes, elle a essayé de le protéger, elle l’a gardé avec elle à Nazareth. Voici, qu’enfin, à Cana, face à la détresse humaine, aux mariés qui n’avaient plus de vin, elle demande à Jésus d’intervenir, de faire quelque chose. Alors, Jésus s’adresse à elle en l’appelant « femme » et il lui dit: « Femme qu’y a-t-il entre toi et moi? ». C’est-à-dire que si Jésus intervient miraculeusement à ce moment, il devra quitter sa mère et entreprendre ce chemin qui le conduira à être condamné à mort. Marie est-elle prête à dire oui? à laisser son propre fils accomplir la volonté de Dieu, à faire complètement confiance à cette volonté et à ce plan divin pour venir au secours de l’humanité? Sa réponse est déterminante car Jésus en s’adressant à elle, s’adresse à toute l’humanité: voulons-nous vraiment que Dieu vienne nous sauver? Jésus va nous expliquer en quoi consistera ce plan de salut, cette oeuvre de Dieu pour conduire l’humanité des ténèbres vers la lumière. C’est pour cela qu’il demande à Marie: « Femme, qu’est-ce qu’il y a entre moi et toi » (Jean 2, 4): c’est Dieu qui s’adresse à l’humanité comme à sa bien-aimée. Ainsi, Jésus va nous expliquer ce qu’y a-t-il entre Dieu et l’humanité, quelle est la nature de ce lien? Cela va nous être révélé et annoncé par le miracle de l’eau transformée en vin. Par ce miracle, Jésus annonce ce que Dieu, en sa personne, va accomplir pour nous sauver, il va nous révéler la nature du lien d’amour entre Dieu et l’humanité. Cela est comme lors d’un mariage où les deux ne font plus qu’un, où la joie de l’un est la joie de l’autre et la peine de l’un devient la peine de l’autre. L’humanité est comme l’eau, si cette eau est prête à accueillir et vivre de l’Esprit divin, cet Esprit d’amour va la transformer, comme l’alcool transforme l’eau et en fait un vin savoureux. Or, ce vin va aussi être l’image du sang, de la vie que Dieu va offrir par amour de l’humanité. C’est ainsi qu’il pourra nous transformer, transformer nos vies, lorsque nous aurons cru à l’immensité de l’amour de Dieu pour nous. Lorsque nous verrons qu’il est prêt à donner sa vie pour nous sans tenir compte de nos fautes, alors c’est la gratitude, la reconnaissance, qui remplit nos coeurs, alors nous aussi sommes remplis d’amour pour lui et nous osons croire à l’amour du Père. En voyant la victoire de l’amour sur le mal et sur la mort, nous oserons risquer nos vies par amour, nous poursuivrons ce même amour. À chaque fois donc que nous faisons mémoire du sacrifice du Christ, nous prenons du vin et laissons tomber une goutte d’eau dans ce vin, pour figurer l’humanité qui est unie à la divinité dans un seul esprit, dans un seul corps sans pouvoir plus les séparer. C’est l’être humain qui est pleinement rempli d’amour, un amour aussi grand que l’amour de Dieu a pour nous. En transformant l’eau en vin, Jésus annonce donc ce qu’il allait accomplir pour nous, il annonce le jour où il allait transformer notre humanité en insufflant en elle son Esprit, son amour. Ce jour-là, sur la croix, aussi, il s’adressera à sa mère en l’appelant « femme » et, après avoir créé une famille nouvelle de frères et soeurs qui reçoivent la vie d’une même source divine, il dira: « tout est accompli » (Jean 19, 30), tout comme au sixième jour, ayant conduit l’humanité des ténèbres à la lumière, « Dieu vit tout ce qu’il avait fait ; et voici : cela était très bon. » (Genèse 1, 31).
En disant « oui » au miracle de Cana, Marie accepte et accueille le plan, la volonté divine et permet ainsi à Dieu de venir à notre secours. À partir de ce moment-là, en effet, Jésus va entreprendre sa vie publique, va quitter la maison de sa mère et s’exposer à l’égarement des êtres humains, au risque de sa vie. La coupe de vin, sera l’image de son sang, de sa vie offerte en sacrifice pour nous. Lors du miracle de Cana, il dit à sa mère: « mon heure n’est pas encore venue » (Jean 2, 4), c’est-à-dire ce n’est pas maintenant que je vais offrir ma vie et réaliser ce mariage, cette union avec l’humanité, mais je vais entreprendre ce chemin, je vais annoncer ce que je suis venu accomplir et puisque tu es prête à accueillir cela, je vais transformer cette eau en vin. L’évangile nous rapporte qu’après avoir goûté le vin que Jésus avait dit aux serviteurs d’apporter au maître du banquet, celui-ci, s’adressant au mariés, s’exclama: « Vous avez gardé le meilleur vin pour la fin, alors que tous servent le meilleur vin au début du repas. » En effet, c’est notre humanité qui était figurée par les cinq jarres d’eau qui ont été transformées en vin. Ce chiffre cinq nous rappelle nos cinq sens, notre condition humaine, sans cesse en train de transgresser les cinq livres de Moïse qui nous transmettent les paroles de Dieu pour guider l’humanité: ce n’est qu’en accueillant la plénitude de l’Esprit de Dieu, qui vient jusqu’à nous que nous pouvons être unis à lui et transformés, acquérir et goûter la saveur de cet amour que nous-même aurons mis en oeuvre, tout comme les serviteurs qui ont rempli les jarres d’eau et ont fait confiance à la volonté de Jésus.
Tout comme lors du mariage de Cana, Jésus est venu au secours de l’humanité afin d’apporter de la joie, afin que ce mariage célèbre pleinement la joie de l’union accomplie, réalisée, entre Dieu et l’humanité…
Comme nous le rappelle saint Paul: « À cause de cela, l’homme quittera son père et sa mère, il s’attachera à sa femme, et tous deux ne feront plus qu’un. Ce mystère est grand : je le dis en référence au Christ et à l’Église. » (Ephésiens 5, 31-32).

L’arbre de vie, mosaïque de la chapelle dédiée à sainte Matrona, à l’intérieur de l’église Ste-Croix à San Prisco, près de Caserta, Italie. De la coupe de l’alliance, contenant le sang du Christ jaillit l’arbre de vie, la vigne qui porte du fruit en abondance. La colombe figure l’humanité qui s’est élévée vers les réalités célestes et a su reconnaître la présence de Dieu, dans l’humilié, le spolié, dans le Christ. Les yeux de la fiancée du Cantique des Cantiques sont beaux comme ceux de la colombe, qui, à l’abri du rocher qui est le Christ, a contemplé le visage de Dieu. La colombe image de la tendresse de l’amour, de la relation confiante avec Dieu, image de l’Esprit Saint qui réconcilie le monde avec Dieu, image du baptisé en qui demeure le Saint Esprit.
Phrase du Notre Père:
Pardonne-nous nos offenses comme nous pardonnons aussi à ceux qui nous ont offensé

La pécheresse pardonnée, mosaïque du Dôme de Monreale, Italie (XII-XIII siècle). Cette femme cherchant le pardon de Dieu a apporté un précieux vase d’albâtre rempli de myrrhe, le baume qu’on utilisait pour honorer la dépouille du défunt. C’est aussi de la myrrhe que les sages d’orient apportèrent à la naissance de Jésus. Elle figure l’hommage, l’action de grâce envers celui qui offrira sa vie pour nous. Jésus, en accueillant la femme prostituée, expose sa vie à la condamnation et en même temps il révèle l’étendue de son amour.
Par cette demande du Notre Père, nous accueillons le pardon de Dieu, c’est-à-dire le don répété à l’infini de son amour. Par-donner signifie en effet répéter le don, donner encore et encore. Cela signifie donc accueillir le don de la vie divine, de son amour qui nous transforme, comme l’eau changée en vin, cela signifie être remplis de son esprit. Alors, notre amour sera semblable au sien et nous aussi nous pourrons apporter son amour et son pardon au monde, faire de même avec notre prochain. C’est dans l’épisode de la femme qui vient demander pardon à Jésus que Jésus nous explique cette dynamique du pardon:
« Un pharisien avait invité Jésus à manger avec lui. Jésus entra chez lui et prit place à table. Survint une femme de la ville, une pécheresse. Ayant appris que Jésus était attablé dans la maison du pharisien, elle avait apporté un flacon d’albâtre contenant un parfum. Tout en pleurs, elle se tenait derrière lui, près de ses pieds, et elle se mit à mouiller de ses larmes les pieds de Jésus. Elle les essuyait avec ses cheveux, les couvrait de baisers et répandait sur eux le parfum. En voyant cela, le pharisien qui avait invité Jésus se dit en lui-même : « Si cet homme était prophète, il saurait qui est cette femme qui le touche, et ce qu’elle est : une pécheresse. » Jésus, prenant la parole, lui dit : « Simon, j’ai quelque chose à te dire. – Parle, Maître. » Jésus reprit : « Un créancier avait deux débiteurs ; le premier lui devait cinq cents pièces d’argent, l’autre cinquante. Comme ni l’un ni l’autre ne pouvait les lui rembourser, il en fit grâce à tous deux. Lequel des deux l’aimera davantage ? » Simon répondit : « Je suppose que c’est celui à qui on a fait grâce de la plus grande dette. – Tu as raison », lui dit Jésus. Il se tourna vers la femme et dit à Simon : « Tu vois cette femme ? Je suis entré dans ta maison, et tu ne m’as pas versé de l’eau sur les pieds ; elle, elle les a mouillés de ses larmes et essuyés avec ses cheveux. Tu ne m’as pas embrassé ; elle, depuis qu’elle est entrée, n’a pas cessé d’embrasser mes pieds. Tu n’as pas fait d’onction sur ma tête ; elle, elle a répandu du parfum sur mes pieds. Voilà pourquoi je te le dis : ses péchés, ses nombreux péchés, sont pardonnés, puisqu’elle a montré beaucoup d’amour. Mais celui à qui on pardonne peu montre peu d’amour. » Il dit alors à la femme : « Tes péchés sont pardonnés. » Les convives se mirent à dire en eux-mêmes : « Qui est cet homme, qui va jusqu’à pardonner les péchés ? » Jésus dit alors à la femme : « Ta foi t’a sauvée. Va en paix ! » (Luc 7, 36-50).
Jésus est invité à manger par un pharisien, un expert de la loi juive, responsable de l’ordre religieux, qui veut trouver des arguments contre lui, pour l’accuser et le condamner au tribunal. Voici qu’une femme de mauvaise réputation entre de force dans la maison et couvre de baisers les pieds de Jésus et Jésus laisse faire. Voici la preuve que le pharisien cherchait: il est ami de prostitués, voilà pourquoi cette femme s’est permise un geste d’une telle confiance. Lorsque la femme verra l’attitude des pharisiens qui accuseront Jésus, elle mesurera l’amour de Jésus pour elle, il a véritablement mis en jeu sa vie pour l’accueillir, il a risqué sa vie pour elle. Recevoir un tel geste d’amour ne peut que nous transformer, se sentir aimés, nous comble et nous remplit d’amour, de reconnaissance, de gratitude, à notre tour et l’on voudrait aussi faire quelque chose pour celui qui a été proche de nous, on voudrait aussi le rendre heureux comme nous le sommes. La joie partagée est multipliée. Et Jésus nous montre cet ordre des choses à travers ses paraboles et ses paroles. Celui à qui l’on a remis une grande dette ne sera-t-il plus reconnaissant? Comment Jésus a guéri cette femme en manque d’amour? il lui a offert un geste d’amour qu’elle n’aurait osé espérer de la part de personne, elle qui était méprisée de tous et dont on ne respectait pas la dignité humaine. C’est par la surabondance de son amour que Jésus guérit nos manques d’amour. C’est ainsi qu’il réalise cette union entre Dieu et l’humanité, ce mariage, en disant sur la croix, à ceux-là mêmes qui étaient en train de le crucifier et de l’insulter : « Père, pardonne-leur car ils ne savent pas ce qu’ils font. » (Luc 23, 34).